Chapitre 21 : Duels dans le blizzard

Publié le par KaiM

 

Kandrill, talonnée par ses poursuivants, traversa plusieurs pièces, changea de direction à deux reprises, parcourut un long couloir et ouvrit finalement une porte donnant sur l’extérieur. Avant de quitter le fort, l’Elfe abaissa un levier fixé dans le mur et une herse tomba au milieu du couloir. Seuls Alexandre et Dario étaient du côté de la sortie. Les autres étaient piégés entre la grille et les Chevaliers. Tarlaq revint sur ses pas et gagna la dernière pièce qu’il avait traversée. Il déposa délicatement Vladek dans un angle tandis qu’Hustouk et Draxor barricadaient la porte.

            Bientôt de violents coups ébranlèrent le battant de bois.

            - Nous avons peu de chances, déclara Namâric en encochant une flèche.

            - Nous allons faire tout notre possible pour les retarder, assura Tarlaq. Qu’au moins Alexandre et Dario aient le temps de s’enfuir !

            - J’ai été très heureux de vous connaître, affirma Draxor. Adieu maintenant.

            - Ne perdons pas le moral ! gronda Tektus. Je ne me suis pas encore totalement vengé de ma servitude, et je les attends de pieds ferme ! Et puis j’aimerais avoir une occasion de remercier Vladek.

            - Pour notre roi ? demanda Hustouk.

            - Pour le Prince ! rugit Tarlaq.

            Et la porte céda.

 

           

            Alexandre et Dario débouchèrent sur une petite place. Le vent et la neige fouettaient leurs visages. Au centre de l’aire se trouvait un puits. A côté du puits se tenait Kandrill.

            - Je vous attendais, déclara l’Elfe. Il semble que vous ayez perdu. Vos amis sont prisonniers dans le fort. Il est impossible qu’ils puissent vaincre mes hommes. Quant à vous, je vais me faire un plaisir de vous anéantir !

            - Je vous rappelle que vous ne pouvez pas me tuer... tenta le Prince.

            - C’est vrai. Mais rien ne précise que tu dois rester en un seul morceau ! Avec les jambes en moins, tu ne chercheras plus à t’échapper !

            - Reste à l’écart, Alexandre, commanda Dario. Je vais balayer ce problème au plus vite.

            - Te voilà bien présomptueux, vieil homme ! railla Kandrill. Tu oublies que nous nous sommes déjà mesurés tout à l’heure. Je sais ce que tu vaux, et je sais que tu ne peux l’emporter sur moi !

            L’Elfe brandit son épée et dégaina un long poignard. Dario empoigna son arme à deux mains et chargea. Kandrill attendit, puis, juste avant le choc, plongea sur le côté en abattant ses armes. Mais le maître Chanteur avait anticipé la riposte, et il bondit à plusieurs mètres de hauteur, avant d’amorcer une descente qui l’amenait droit sur son adversaire. l’Elfe réalisa une roulade arrière afin d’esquiver l’attaque, et se releva dans le même mouvement. Dario s’avança en faisant tournoyer son sabre sans porter le moindre coup, attendant de pouvoir surprendre son adversaire. Mais Kandrill était une guerrière expérimentée, et elle repéra sans peine le mouvement qui n’était pas une feinte. Elle détourna l’assaut à l’aide de son poignard tout en fouettant l’air de son épée. Le maître Chanteur recula vivement, et la lame ne fit que frôler sa gorge. Aussitôt, L’Elfe lança sa dague sur son adversaire, mais Dario parvint à la dévier d’un grand moulinet de son sabre. Le mage raffermit sa prise sur la poignée de son arme, puis reprit la lutte.

            Si le duel que livraient les deux guerriers avait été une danse, il aurait sans aucun doute emporté l’admiration du public et l’enthousiasme des juges. Les deux adversaires virevoltaient, bondissaient, plongeaient, roulaient, frappaient, enchaînant les figures les plus folles au milieu de la tempête sans une seconde de répit. Mais ce n’était pas une simple chorégraphie. C’était un combat à mort, et chaque mouvement était empreint de la volonté de faire périr l’ennemi.

            Kandrill repoussait Dario vers le puits, dans l’espoir de le voir trébucher. Mais le mage avait repéré la construction dès son arrivée, et d’un saut périlleux il parvint derrière l’obstacle. L’Elfe, comprenant que ses pièges ne fonctionneraient pas sur le maître Chanteur, changea de stratégie. Elle se jeta sur Alexandre. Le Prince leva son épée pour se défendre, mais il savait qu’il ne pouvait rien contre un tel adversaire. Il vit Dario accourir à son secours, suivant Kandrill de moins d’un mètre. Il vit l’Elfe s’immobiliser soudain et pointer son épée vers l’arrière. Il vit la lame pénétrer dans l’abdomen du maître Chanteur. Il le vit tomber, son sang inondant la neige.

            - Imbécile ! ricana Kandrill en se redressant. Tu aurais fini par me vaincre, si tu n’avais pas cherché à protéger ce gamin !

            Dario murmurait des paroles presque inaudibles. Alexandre, qui était sur le point de fondre en larmes, comprit que le mage entonnait un Chant. Il allait survivre, si on lui en laissait le temps !

            Kandrill leva son épée.

            - Tu as été un adversaire de valeur. Ta tête sera un magnifique trophée !

            Alexandre chargea en hurlant. L’Elfe para le coup, pivota sur elle-même et d’un mouvement précis de sa lame, entailla la main du Prince, qui lâcha son arme et tomba à genoux.

            - Ton tour viendra. Ne sois pas si pressé !

            Kandrill s’apprêta de nouveau à achever sa victime, puis eut une idée et se tourna vers Alexandre.

            - Cependant, déclara-t-elle, je suis prête à vous laisser partir tous les deux. Si, bien sûr, tu me remets les Bracelets d’Arzhan !

            Le Prince savait qu’il ne devait pas céder. Mais il savait aussi qu’il n’y avait pas d’autre issue. Il fixa les yeux sur les Bracelets et entreprit de défaire le sort qui les liait à ses poignets. Soudain, il sentit une force s’insinuer dans son esprit, et il se sentit basculer dans les Bracelets. En l’espace d’une fraction de seconde, sa précédente incursion dans les deux objets lui revint en mémoire. Il vit à nouveau l’intérieur des bijoux, leur architecture complexe lui apparut, l’immense énergie qu’ils abritaient. Alexandre comprit que chaque recoin des Bracelets dissimulait une force insoupçonnée, issue d’un type précis de magie. Il n’y avait plus seulement une grande lumière comme la fois précédente, mais aussi une mer immense, un abîme de flammes, des contrées verdoyantes, des tempêtes qui se déchaînaient, des démons enfermés derrière des grilles d’acier, des éclairs qui déchiraient un ciel noir... Le Prince sentit toutes ces forces s’offrir à lui et se releva, face à Kandrill.

            - Que fais-tu ?! s’écria l’Elfe, une expression de terreur folle sur le visage.

            Alexandre joignit les mains et les dirigea vers son adversaire. Il choisit d’utiliser le vent. Des étincelles crépitèrent au creux de ses paumes, puis un souffle titanesque s’abattit sur Kandrill et l’emporta dans les airs, où elle hurla pendant quelques secondes avant qu’un éclair ne la frappe de plein fouet et la réduise en cendres.

            - Très bien, bravo ! s’exclama une voix derrière Alexandre.

            Le Prince se retourna et découvrit Greta.

Publié dans histoiresdefarlo

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